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  • : Mark Storm - Space Adventure
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14 septembre 2010 2 14 /09 /septembre /2010 19:00

 


Alen le fixa d’un œil songeur. Sans l'avoir cherché, sa réponse avait été lourde de sous-entendus. Ce voile à peine soulevé sur un coin de sa vie lui laissait entrevoir un passé plus sombre qu’il ne l’aurait cru. Il n’eut pour une fois aucun mal à faire taire sa curiosité. Non, finale-ment, il n’avait guère envie d’en savoir plus, même s’il sentait qu’en cet instant il lui aurait suffi de peu de chose pour partager les souvenirs où Mark semblait s’être plongé.

Même pas 17 ans…
Son entrée dans la Horde s’était faite bien avant l’âge limite, ce qui constituait une remarquable exception. Ce n’était pas une étiquette qui plaisait à tout le monde. Le plus hostile fut sans conteste le chef du groupe dans lequel le hasard des répartitions l’avait fait entrer. La force et la richesse de ces groupuscules semi-indépendants à l’intérieur de l’organisation mère dépendaient exclusivement des capacités de ses membres. Trop jeune et trop inexpérimenté à ses yeux pour être un élément valable, Denon prit comme un affront personnel de devoir l’accepter parmi les siens. Ne pouvant malheureusement faire autrement, il lui fit tout de suite payer sa contrariété par un traitement de faveur lourd de conséquences.
Bien décidé à lui faire comprendre qu’il n’avait pas sa place dans la Horde, il n’épargna rien à sa nouvelle recrue. Têtu, Mark dut déployer beaucoup d’énergie pour lui prouver le contraire et s’accrocher à sa place. Il était prêt à tout pour cela, évidence dont Denon usa et abusa à tous les niveaux, que ce soit dans la vie quotidienne du groupe, durant les entraînements ou les attaques.
Si la vie au sein de la Horde avait la réputation d’être difficile et dangereuse, la sienne devint vite un petit enfer savamment entretenu par son chef. Il le poussait sans cesse au-delà de ses limites, physiques ou psychologiques, cherchant le point de rupture qui lui ferait aban-donner la partie. Finalement pris au piège de son propre ego, Mark n’eut d’autre choix que de combler au plus vite le fossé qui le séparait de ses coéquipiers s’il voulait survivre parmi eux, essayant de ne pas réfléchir à ce que cela signifiait parfois.
Obligé de mûrir et de grandir très vite, il s’intégra, peu à peu. Mais cela ne lui apporta aucune bonne grâce de la part de Denon. Bien sûr, celui-ci le regarda se transformer par la force des choses, devenant un élément plutôt rentable, mais il n’aimait pas sa capacité à lui tenir tête. Cette animosité le poussait à ne jamais lui laisser une possibilité d’erreur et il se faisait un plaisir de le lui rappeler lorsque cela se produisait. Mark le savait et s’arrangeait pour l’éviter autant que possible. Mais nul n’était parfait.
Quelques mois à peine après son arrivée, il provoqua la perte d’une part du butin qui aurait dû revenir à son groupe après une action col-lective. Denon ne leva pas le petit doigt lorsqu’une partie de ses coé-quipiers se chargea de lui signifier toute l’ampleur de leur frustration, le laissant à moitié inconscient après un passage à tabac en règle. Denon le rejoignit alors d’un pas tranquille.
— Je te préviens morveux, décréta-t-il une fois accroupi auprès de lui, tu me refais une fois un coup pareil et je te jure que tu me sup-plieras de t’achever.
Ce n’était pas une menace en l’air. Les exécutions communes à la Horde n’étaient pas réservées à ses seuls ennemis et elles pouvaient être plus féroces encore quand elles visaient l’un de ses membres. Mark le tint pour dit. N’ayant pas plus envie d’en faire les frais que d’abandonner la partie, il se moula plus encore dans cette vie devenue sienne, mettant un point d’honneur à affirmer cette appartenance que Denon lui refusait toujours.
Était-ce pour cela que ce dernier le désigna un jour comme « combattant » lors d’une contestation de partage ? Pour éviter que des groupes s’entretuent lorsqu’une répartition de butin posait problème, la Horde avait instauré un concept simple et efficace : deux hommes issus de chaque camp s’affrontaient et le vainqueur raflait la mise. Hormis les armes lasers, ils pouvaient utiliser tout ce qui leur tombait sous la main. Pour gagner, il fallait récupérer le sigle du groupe attaché autour du poignet de l’adversaire. Lorsque c’était chose faite, le vainqueur ramenait non seulement la part contestée à son groupe, mais également la totalité du butin du groupe adverse. Contester un partage n’était donc pas anodin.
Avait-il eu, dès le départ, la moindre chance de gagner ? Un seul regard sur Gius, l’homme choisi par le camp adverse suffisait à en douter. Sa carrure impressionnante lui avait valu le surnom de « Killer ». Mark y mit toute sa hargne, mais de miracle il n’y eut pas. S’il résista plus longtemps que les paris lancés sur lui l’avaient prédit, Gius finit par le mater et il se retrouva plaqué au sol, à moitié étranglé, avant de se faire arracher le précieux bracelet.
Il essayait de reprendre son souffle lorsqu’un nouveau poids s’abattit sur sa poitrine. C’était le pied de Denon.
— Je tiens toujours mes promesses, asséna-t-il d’un ton mauvais avant de se pencher vers lui.
Le laser à peine posé, il lui tira dans l’épaule à bout portant. La puissance de l’arme n’était pas maximale, juste de quoi le transpercer sans pour autant provoquer de blessure mortelle.
Cedrus, le chef du groupe mis au défi, observa la scène d’un œil songeur. Pourquoi une telle réaction ? Ce « gamin » n’aurait pas pu gagner contre Gius même s’il avait été impressionné par sa résistance et ses capacités au combat. Et pourtant, il avait été désigné, comme si sa défaite avait été recherchée. Si c’était le cas, il trouvait cela ridicule. Pourquoi gâcher tant de talents ?
— Je te l’échange contre ta part de butin, lança-t-il au moment où il vit Denon changer de cible.
Denon fronça des sourcils, agacé. Il savait que ses hommes avaient entendu sa proposition et que l’appât du gain serait plus forte que de savoir ce qu’il adviendrait de Mark.
— Si tu y tiens…, concéda-t-il au bout d’un long silence. Sauvé sur le fil on dirait morveux, murmura-t-il ensuite avant de se relever. Mais on se recroisera bien un jour.
D’un claquement de doigts, il ordonna à ses hommes de récupérer la marchandise puis se dirigea vers son appareil sans un regard der-rière lui.
Sur l’ordre de Cedrus, Gius récupéra leur nouveau coéquipier tou-jours à terre. Il le releva et le ramena vers son chef d’un seul bras.
— Bah ! Ça ne te tuera pas, constata Cedrus en jetant un œil sur l’épaule transpercée. Dis-moi, reprit-il alors que sa jeune recrue faisait de son mieux pour tenir debout tout seul, tu étais dans ce groupe depuis combien de temps ?
— Plus d’un an, répondit Mark d’une voix atone.
— Oh… ? Et tu es toujours vivant ? Eh bien on dirait que tu es plus coriace que je ne l’aurais cru ! fit Cedrus d’un ton aussi surpris que satisfait. Tu sais…, reprit-il avec un léger sourire, c’est bien d’avoir de la fierté, mais en avoir trop, peut vite devenir une faiblesse. Si Denon l’a compris, d’autres le feront, alors je te conseille de travailler très vite là-dessus si tu veux rester en vie.
Ce n’était pas une invitation, mais un ordre. Cedrus n’était pas du genre à se répéter et si les exploits de son groupe étaient enviés c’est parce qu’il attendait de ses hommes d’être plus que des pirates de seconde zone.
— Oh, encore une chose, lança-t-il alors que Gius s’apprêtait à l’emmener à l’infirmerie du vaisseau. Contrairement à d’autres groupes, je ne tolère ni alcool ni drogues avant ou pendant une action !
— C’est pas mon truc, se défendit sa nouvelle recrue dans un froncement de sourcils.
Cedrus hocha la tête. Il connaissait Denon et ses méthodes.
— Ne l’oublie pas ! répéta-t-il simplement.
En l’intégrant dans son groupe, Cedrus ne lui sauva pas seulement la vie, Mark le comprit très vite. Sa nouvelle famille n’était pas plus facile que les autres, mais il y avait sa place et, surtout, un chef qui avait deviné en lui un potentiel à ne pas négliger. Surveillant tout particuliè-rement sa formation, Cedrus lui enseigna peu à peu tout ce qu’il pouvait savoir. Au bout de deux ans, il en vint même à lui confier de petites missions, le jugeant capable de les assumer seul.
Au retour de l’une d’elles, Mark retrouva Denon sur sa route. Averti d’un souci dans la répartition des prises lors d’une action commune, il était allé vérifier le tableau de partage lorsqu’une voix qu’il connaissait bien s’était élevée derrière lui.
— Eh le morveux ! Ça faisait longtemps !
Morveux. C’était un sobriquet qui n’avait plus lieu d’être, Denon l’avait remarqué tout de suite. Mark avait beaucoup changé en deux ans, et pas que physiquement. Il dégageait une présence qui aurait pu faire douter qu’il avait tout juste vingt ans.
— Un problème avec nos parts respectives ? reprit Denon après avoir jeté un œil sur la partie du tableau que Mark venait de consulter.
— Je vérifiais, c’est tout, rétorqua ce dernier en tournant des talons.
Denon sourit.
— Pour moi il n’y a pas de problèmes, tu peux le contester…, laissa-t-il échapper d’un ton anodin.
Mark s’était figé à quelques pas. Lancée devant les membres des deux groupes, la proposition ne pouvait rester sans réponse, mais la situation était délicate. La prise du jour était trop importante pour la mettre en danger sur un coup de tête. Les regards de ses coéquipiers étaient plutôt clairs sur ce point, mis à part celui de Gius qui, d’un signe, lui avait proposé de le choisir.
— Mais…, reprit Denon au bout d’un long silence, tu préfères peut-être éviter….
Les traits du jeune pirate s’assombrirent. Il le défiait ouvertement et cela n’avait rien à voir avec un problème de partage. Cedrus n’approuverait pas, il le savait.
— Si c’est contre toi, répliqua-t-il en se tournant vers lui, alors je conteste.
Le sourire de Denon s’élargit alors qu’il décrochait sa ceinture laser de sa taille. Une fois le signe de la Horde attaché autour de leur poignet gauche, ils se mirent en place sous l’œil intéressé des specta-teurs. La contestation n’était qu’un prétexte, ce n’était un mystère pour personne, et tous tenaient à en connaître l'issue.
Denon comprit très vite que le niveau du ressentiment du jeune pirate à son égard le pousserait à bien plus que la seule récupération de son sigle.
— Si ça t’amuse…, murmura-t-il comme pour lui-même.
Alors que les paris allaient bon train parmi les spectateurs, les deux hommes se lancèrent dans une lutte aussi violente qu’acharnée. Sentant qu’il n’aurait peut-être pas aussi facilement le dessus, Denon profita de ce que son adversaire soit à distance pour récupérer un poignard laser sur l’un de ses hommes. Toujours à main nue, Mark dut reculer face à des attaques devenues dangereuses, mais si Denon crut avoir pris le contrôle de la situation, Gius changea la donne en jetant un bout de la barrière qu’il venait d’arracher du sol. Mark l’attrapa au vol, juste à temps pour désarmer son adversaire dont la lame venait de flirter avec son visage.
Les deux hommes luttèrent aussitôt pour cette barre de tiuim. Dans le feu de l’action, tous deux roulèrent deux ou trois fois à terre. Denon fut le plus habile à ce petit jeu et, gardant le contrôle, il réussit à plaquer son adversaire au sol. Assis sur lui, il repoussa la barre de toutes ses forces vers sa gorge. Mark la sentait glisser de plus en plus sans qu’il parvienne à retourner la situation. Il décida alors une ma-nœuvre dangereuse. Lâchant sa prise d’un coup, il posa les deux mains contre le ventre de son adversaire alors qu’il tombait vers lui, il le souleva puis l’éjecta d’un coup de genou. Denon plongea en avant tête la première. Il eut juste le temps de poser un bras au sol pour terminer sa chute dans une roulade qui le laissa à genou, les mains par terre. À peine libéré, Mark récupéra le poignard qu’il venait d’apercevoir près de lui puis roula sur lui-même afin de se rapprocher son adversaire. En un seul mouvement, il le poussa alors d’un violent coup de pied dans les côtes, se saisit de son poignet tandis qu’il re-tombait sur le dos et le trancha de part en part juste en dessous du bracelet. La lame vola si vite dans les airs qu’elle balafra au passage la joue de Denon en train de hurler de douleur avant de venir se poser sur son cou.
— Mark ! Ça suffit !
Réalisant qu’il irait jusqu’au bout, Cedrus, qui venait seulement de rejoindre ses hommes, avait décidé d’intervenir. Les contestations ne devaient pas se solder par la mort des participants, c’était la règle. Tou-jours assis sur le ventre de son adversaire, Mark resta immobile, de longues secondes. Son supérieur ne réitéra pas son ordre. C’était à lui de choisir. Sans un mot, il finit par se lever et prit la direction de son groupe. Arrivé à la hauteur de son chef, il lui tendit son trophée ensan-glanté.
— Leur part est à nous, lâcha-t-il d’un ton glacial avant de conti-nuer vers leur vaisseau sous le regard songeur de Cedrus.
— Fier et rancunier, se dit-il en secouant la tête. Enfin…, s’il en assume les conséquences, il ira loin.
Ce qui lui convenait parfaitement.

 



Encore un petit extrait ? par ici !!!  (cliquez sur l'image) 



 

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